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Pesticides : les vrais risques pour la santé

Les pesticides sont largement utilisés en agriculture et à la maison. Ces produits chimiques sont soupçonnés dans de nombreuses pathologies. Il est temps de modifier nos habitudes.


https://www.santemagazine.fr/sante/sante-environnementale/pesticides-les-vrais-risques-pour-la-sante-175860





Destinés à détruire les mauvaises herbes, les insectes ou les champignons, les pesticides sont toxiques par nature. Quelque 309 substances actives sont actuellement autorisées en France. Sont-elles dangereuses pour l’homme ?

Une augmentation inquiétante des maladies chroniques

De plus en plus de données scientifiques vont dans ce sens, comme l’a montré une expertise collective de l’Inserm parue en juin 2013. Des incertitudes demeurent, cependant, sur les risques des faibles doses et sur l’effet-cocktail (expositions multiples, mélanges avec d’autres substances…).

« Nous en sommes encore à établir la relation entre la dose et l’effet à partir d’études épidémiologiques », reconnaît le Dr Sylvaine Cordier, épidémiologiste à l’Inserm.

Pourtant, sans attendre, plus de 1 200 médecins « de terrain » ont signé un appel en janvier dernier. Un véritable cri d’alarme. « Nous en savons assez pour agir ! » assure le Dr Pierre-Michel Perinaud, l’un des signataires. Ces praticiens s’inquiètent de l’augmentation des maladies chroniques.

« Nous constatons qu’il y a plus de maladies de , de troubles cognitifs, de cancers, de , de troubles de la fertilité… Nous ne prétendons pas que les pesticides sont l’unique cause. Mais ils jouent un rôle. Petit, grand, moyen ? Cela reste à déterminer », explique le Dr Perinaud.

La France, premier utilisateur européen de pesticides

l est vrai que les pesticides sont omniprésents en agriculture, dans les jardins, dans les maisons… Malgré l’annonce de plans de réduction, la France reste le premier utilisateur de pesticides en Europe (environ 80 000 tonnes par an).

Conséquence : le taux d’imprégnation de la population est impressionnant. L’Institut national de veille sanitaire (InVs) a retrouvé des traces d’insecticides dans 90 % des échantillons d’urines qu’il a testés.

Devant la multiplication des signaux d’alarme, les experts nous incitent à réduire notre exposition.

Les agriculteurs sont les premières victimes des pesticides

Appelés à manipuler régulièrement des produits phytosanitaires, les agriculteurs en sont les premières victimes.

La maladie de Parkinson reconnue comme maladie professionnelle

En 2012, la maladie de Parkinson a été inscrite au tableau des maladies professionnelles. Il est, aujourd’hui, admis que l’utilisation régulière de pesticides pendant plus de dix ans est un facteur de risque. Une vingtaine d’agriculteurs a obtenu cette reconnaissance en 2012, cinquante en 2013.

Le lymphome (une forme de cancer) pourrait être la prochaine maladie professionnelle reconnue.

Ces deux pathologies font partie, avec les cancers de la prostate et les myélomes, des maladies pour lesquelles l’Inserm estime qu’il y a une « forte présomption » de lien avec l’usage de pesticides agricoles.

Cette présomption est jugée « moyenne » pour les leucémies, la maladie d’Alzheimer, les troubles cognitifs, et l’impact sur la fertilité.

Enfin, des doutes existent sur la santé des enfants dont la mère a été exposée professionnellement pendant sa grossesse. Des études montrent une augmentation du risque de malformations congénitales, de leucémies, de troubles de la mémoire…

Quelles solutions ?

Des actions de prévention sont menées par la Mutualité sociale agricole (MSA) pour sensibiliser les agriculteurs aux bonnes pratiques (organisation du chantier, port de gants, de masques et de combinaisons, choix du matériel de pulvérisation…). Mais ces conseils ne sont pas toujours faciles à appliquer. Pour faire reconnaître une maladie professionnelle, un agriculteur doit adresser une déclaration et un certificat médical à la MSA. Un certain nombre de critères sont requis, mais « a priori, il n’y a aucune raison de refuser la reconnaissance d’une maladie de Parkinson à un céréalier, un maraîcher ou un viticulteur, car ce sont des activités habituellement exposantes », observe le Dr Michel Gagey, médecin chargé de la santé et de la sécurité au travail à la MSA. D’autres maladies peuvent être reconnues “hors tableau”, mais dans le cadre d’une expertise individuelle. La MSA a, par ailleurs, mis en place Phyt’attitude (n° vert gratuit : 0 800 887 887) qui permet de signaler les effets secondaires liés à l’usage des pesticides : maux de tête, , irritations… Environ 200 appels sont reçus chaque année.

Si on vit près des zones traitées par des pesticides

Les pesticides peuvent atteindre les personnes qui résident à proximité des champs traités. L’expertise collective de l’Inserm s’inquiète des conséquences. « Des résidus d’herbicides ont été retrouvés dans l’urine des familles vivant à proximité de cultures céréalières en Bretagne », observe le Dr Cordier.

La grossesse, une période à risque

Cette même étude a révélé des perturbations métaboliques chez les femmes enceintes, au premier trimestre de leur grossesse. « Nous ne sommes pas sûrs que ces modifications soient liées aux pesticides. Il n’y a pas de toxicité à court terme. Mais il faut creuser pour voir s’il y aura des conséquences à long terme », note la chercheuse.

Plus de 80 pesticides sont en effet soupçonnés d'être des perturbateurs endocriniens. Ils pourraient influer sur le métabolisme du bébé.

Une étude américaine qui vient d'être publiée relève de son côté des liens entre l'exposition aux pesticides des femmes enceintes et la naissance d'enfants autistes. Là encore, les chercheurs se montrent prudents et se gardent bien de déduire un lien de cause à effet.

Mesures de restriction aux Antilles

L’inquiétude est forte en Martinique et en Guadeloupe, où des pesticides ont été largement pulvérisés sur les cultures pendant des dizaines d’années. Aujourd’hui, la consommation de certaines denrées fait l’objet de mesures de restriction et les Antilles enregistrent des taux alarmants de cancers de la prostate et de naissances prématurées.

« La persistance dans l’environnement du chlordécone (un insecticide interdit en 1993, N.D.L.R.) semble contribuer à l’augmentation de ces pathologies, admet Sylvaine Cordier.  Mais il faut aussi prendre en compte des prédispositions génétiques pour le cancer de la prostate et des facteurs socio-économiques pour la prématurité. »

Quelles solutions pour les populations concernées ?

On peut considérer les périodes d’épandage comme des épisodes de pollution. « Il est donc recommandé aux personnes qui ont des difficultés respiratoires de ne pas sortir et d’éviter de faire de l’exercice à ces moments-là », préconise Régine Lange de la Fédération Atmo-France qui surveille la qualité de l’air. Autre conseil : aérer les habitations (évidemment pas pendant les traitements). Les épandages aériens sont, en principe, interdits mais font l’objet de nombreuses dérogations. Les médecins lanceurs d’alerte réclament leur suppression définitive. « Nous proposons également d’établir des zones tampon. La distance de sécurité entre les épandages et les habitations est actuellement de 50 m. En Belgique, elle est de 300 m », souligne le Dr Perinaud. Autre revendication : cultiver en bio les zones qui entourent les captages d’eau potable. En 2010, 4 % des prélèvements ont été jugés non conformes à la réglementation sur les pesticides.

Comment éviter les aliments contaminés par les pesticides ?

Selon les enquêtes de la Répression des fraudes, environ 3 % des fruits et des légumes contiennent des résidus de pesticides au-delà de la limite autorisée.

Les dépassements concernent essentiellement le raisin, les pommes, les poires, les cerises, les poivrons, le céleri, les navets, le persil, la laitue et les épinards.

Manque de contrôle sur les fruits et légumes

La réglementation sur les pesticides est donc respectée la plupart du temps. Mais est-elle adaptée ? Non pour le Dr Laurent Chevallier, médecin nutritionniste : « Les normes ne sont pas suffisamment réactualisées ».

Dans son dernier rapport, la Cour des comptes souligne, par ailleurs, l’insuffisance des contrôles sur les fruits et les légumes. Elle note qu’en 2010 les produits français ont plus souvent dépassé les limites autorisées sur les résidus de pesticides que les autres produits européens.

Quelles solutions ?

Eplucher et laver les légumes est, certes, utile pour des raisons d’hygiène. Mais cette précaution n’a qu’un impact limité sur le taux de pesticides.

« Beaucoup de produits phytosanitaires ont un effet systémique. Ils rentrent et ils restent dans la plante », observe le Dr Chevallier. Il recommande de privilégier une alimentation bio.

« En choisissant les denrées les plus courantes en bio (pommes, poires, œufs, produits laitiers…), on réduit probablement son exposition aux pesticides d’environ 80 % », estime-t-il.

Le Dr Chevallier se veut rassurant sur le saumon dont les Norvégiens ont signalé le taux de pollution. « Le problème est plus la dioxine que les pesticides. Leur utilisation est interdite quelque temps avant l’abattage »,souligne-t-il.

Quant aux petits pots pour bébés, ils sont soumis à une réglementation stricte. « Normalement, il n’y a pas de risque même dans les produits non bios », assure le nutritionniste.

Changer ses habitudes si l'on désherbe et désinsectise chez soi

A domicile, les pesticides restent très utilisés : contre les fourmis, les cafards, les puces du chien, les pucerons des rosiers… « Or, différentes études montrent un lien entre l’exposition domestique aux pesticides pendant la grossesse et l’augmentation du risque de leucémie chez l’enfant »,alerte Sylvaine Cordier.

Seule solution : modifier nos habitudes

Les 17 millions de jardiniers amateurs, qui consomment 5 % des pesticides vendus chaque année en France, vont devoir apprendre à s’en passer.

L’utilisation de produits phytosanitaires leur sera interdite à partir de 2022. Ils disparaîtront des espaces verts publics dès 2020. Il faudra donc revenir à des méthodes plus “écolos” : compter sur les coccinelles mangeuses de pucerons, désherber à la main, planter des variétés adaptées au sol et plus résistantes…

Pour éviter de pulvériser dans les maisons, ne laissez pas traîner de nourriture afin de limiter les invasions d’insectes et éliminez les puces des animaux domestiques en repassant leur couchage à la vapeur. 

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